Double Destinée (La otra) de Roberto Gavaldón (1946).
Notes de janvier.
4 janvier
Fin de partie. Sur Eephus de Carson Lund.
8 janvier
Vu la Voyageuse (A Traveler's Needs). Pourquoi les films de Hong Sang-soo où joue Isabelle Huppert me séduisent moins? La question est née d'un constat: si dans In Another Country, Huppert donnait l'impression d'être relativement soluble dans le cinéma de Hong, List, le court-métrage qu'avait tourné ce dernier, dès le lendemain, avec les mêmes acteurs, sauf Huppert repartie en France, et la même trame narrative, jusqu'à réutiliser les scènes du début, oui eh bien, ce second film, plus hongien, se révélait finalement beaucoup plus séduisant. De même, si l'on considère deux films présentés en 2017 à Cannes, à savoir la Caméra de Claire (tourné à Cannes l'année d'avant) et le Jour d'après, on peut dire que le premier souffre cruellement de la comparaison tant le rôle d'Huppert, écrit dans la marge, ne semble là que comme valeur ajoutée... Quant à la Voyageuse, c'est quand même bizarre que la partie la plus stimulante du film soit celle où le jeune poète (qui héberge Huppert) se fait engueuler par sa mère (en l'absence justement d'Huppert), scène où l'on parle enfin coréen (et non anglais comme dans le reste du film) et où se dégage un peu de tension...
Je pose la question car je n'ai pas vraiment la réponse. Peut-être qu'en présence d'Huppert, Hong se trouve moins inspiré, peut-être que c'est parce que chez Hong, Huppert, on ne sait pas pourquoi, a tendance à minauder... ou tout simplement parce qu'elle n'est pas à la base une actrice suffisamment rohmérienne pour convenir totalement au cinéma de Hong.
10 janvier
Chambre avec vue — Pas trop convaincu par la Chambre d'à côté, le dernier Almodóvar. L'auteur traite son sujet (le suicide assisté) avec élégance, Tilda Swinton et Julianne Moore sont très bien, évidemment, mais le cadre très sophistiqué dans lequel tout cela évolue, avec vue imprenable sur la skyline de New York puis cette maison futuriste, intégrée au paysage, où se replient les deux personnages (c'est la Casa Szoke située au nord de... Madrid), bref toutes ces lignes qui découpent l'espace, associées à la gravité du thème, confèrent au film un côté bel objet, à la fois esthétique et théorique, un peu trop "sous cloche" pour que s'y dégage une véritable émotion. Pour le dire autrement: à trop vouloir contrebalancer le morbide de la situation par une mise en scène aérienne, lumineuse, colorée, etc. qui soit du côté de la vie, Almodóvar finit, faute d'aménager un peu d'ombre dans le tableau, par affadir son film. Tout y est étonnamment lisse, sans aspérités, à l'image du personnage de la fille jouée également par Swinton (comme dans Eternal Daughter de Joanna Hogg). On est loin des mélos passionnés d'antan (qu'ils soient hollywoodiens, ou almodovariens, ah la Fleur de mon secret!), ce que n'arrange pas non plus toutes ces considérations politico-philosophiques, bien dans l'air du temps, qu'Almodóvar se croit obligé d'ajouter via le personnage de Torturro... De sorte qu'à la fin, lorsque le flic "pro-life" interroge Moore, on se prend à rêver d'un nouveau film qui débuterait, un bon petit polar comme en a fait aussi Almodóvar, mais non... fausse piste.
16 janvier
David Lynch est mort.
17 janvier
La cybernétique de Bernie. Sur Bernie de Richard Linklater (2011).
30 janvier
Plus belle la vie — Beaucoup aimé la Pie voleuse. Du pur Guédiguian, avec sa troupe habituelle (qui vieillit bien), son quartier habituel (L'Estaque à Marseille), ses thèmes habituels, qui croisent Pagnol et Victor Hugo: les Pauvres Gens, comme dans les Neiges du Kilimandjaro. On pourrait trouver ça simpliste, voire caricatural, sauf que les personnages y sonnent vrai, dans ce qu'ils expriment, dans ce qu'ils éprouvent (la palme à Meylan, mon préféré de la bande), Guédiguian élaborant son petit récit de façon très fluide, très musicale, à l'image de toutes ces partitions pour piano qu'il utilise pour l'accompagner, et d'où finit par sourdre une réelle émotion (de la pie voleuse à la pie qui chante), gage que son film a bien atteint son but.
31 janvier
Vu sur arte.tv Double Destinée de Roberto Gavaldón (1946), un superbe mélo mexicain à l'esthétique de film noir, Gavaldón ayant fait ses gammes à Hollywood. Film marqué en même temps par ce qui est peut-être le style propre du réalisateur (c'est le premier film de lui que je voie), à savoir une vraie science de l'espace, de la scénographie, qui non seulement l'éloigne du cinéma réaliste qui prévalait à l'époque au Mexique, mais aussi confère au film noir, par l'intégration des décors au drame qui s'y joue, une dimension "architectonique", qui mêle dans un même espace le rêve de grandeur de l'héroïne (Dolores del Río) et le sentiment que cet espace n'est qu'un leurre, se réduisant comme une peau de chagrin jusqu'à ne plus former qu'un minuscule carré, aux allures d'oubliette.